Joel et Ethan Coen


Burn after reading


Générique technique :

Réalisateur : Joel et Ethan Coen

Scénario : Joel et Ethan Coen

Sociétés de production : Focus Features ; StudioCanal (Issy les Moulineaux) ; Relativity Media ; Working Title Films

Producteurs : Joel et Ethan Coen

Distributeur d'origine : StudioCanal Distribution (Issy les Moulineaux)

Directeur de la photographie : Emmanuel Lubezki

Ingénieur du son : Peter Kurland ; Skip Lievsay ; Craig Berkey ; Greg Orloff

Décorateur : Jess Gonchor

Monteur : Roderick Jaynes

Compositeur de la musique : Carter Burwell


Générique artistique :

George Clooney : Harry Pfarrer

Frances McDormand : Linda Litzke

Brad Pitt : Chad Feldheimer

John Malkovich : Osborne Cox

Tilda Swinton : Katie Cox

Richard Jenkins : Ted

Elizabeth Marvel : Sandy Pfarrer


Synopsis :

Osborne cox, analyste à la CIA, est convoqué à une réunion ultra-secrète au quartier général de l'Agence à Arlington, en Virginie. Malheureusement, il découvre rapidement l'objectif de cette réunion : il est renvoyé. Il décide d'écrire ses mémoires. Sa femme, Katie, qui entretient une liaison avec un financier (marié), Harry Pfarrer, n'accepte pas cette nouvelle. Elle demande le divorce.

À mille lieues de cela, Linda Litzke travaille dans un club de Gym avec Chad. Elle cherche l'homme de ses rêves sur internet et projette une quadruple opération de chirurgie esthétique.

Un jour, un CD contenant les notes d'écriture de Osborne Cox est retrouvé dans les vestiaires des femmes. Chad et Linda, persuadé qu'il s'agit là de documents très confidentiels tentent de vendre ces documents. De son côté, Ted, le patron du club de gym qui en pince pour Linda, est persuadé que « rien de bon ne sortira de tout ça »...


Commentaire :

Onze mois après la sortie française de No country for old men, les frères Coen offrent aux écrans français leur nouveau film : Burn after reading ! Nouvelle à la fois réjouissante pour les amateurs de l'humour corrosif du duo et un peu précipitée pour d'autres amateurs de ces films qui pensaient encore avec plaisir à No country for old men. En effet, on a à peine eu le temps de le voir, de le revoir en dvd que déjà le petit dernier sort sur les écrans ! Une question sur les lèvres des spectateurs : sera-t-il aussi bien que le dernier ?


Jeux d'acteurs

Comme chacun l'aura remarqué, les frères Coen se sont entourés pour cette nouvelle production d'une pléiade d'acteurs célébrissimes. Que se passe-t-il donc quand les frères Coen s'attaquent à ces monstres médiatiques ? Et bien là même chose qu'avec n'importe quel autre thème qu'ils pourraient aborder : ils s'emploient à la destruction du mythe !

Prenons Brad Pitt. Il incarne un jeune employé de club de gym : sportif plutôt beau gosse et écervelé ! Jusque là, rien de bien révolutionnaire : Brad Pitt incarne Chad à merveille en faisant son numéro de Brad Pitt... Chaque scène où il apparaît est un moment de rire assuré, la naïveté confondante du personnage en fait un clown qui rend chaque situation hilarante, de la séance d'étirement sur un client à la négociation d'une rançon sous le pseudonyme de M. Black. Sur l'écran, le spectateur voit à coup sûr l'idole de papier glacé sans que rien ne soit fait pour qu'on l'oublie : les frères Coen ne tentent pas de le rendre méconnaissable à coup de maquillage et de costumes, mais au contraire, utilisent sa notoriété... pour mieux le détruire. Et oui, l'originalité du traitement de cet acteur tient en la manière qu'emploient les réalisateurs-scénaristes pour le faire disparaître. Alors qu'il s'était introduit chez les Cox pour trouver de nouvelles « informations secrètes », l'amant de Katie Cox, Harry Pfarrer rentre. Chad est contrait de se cacher dans le placard. Il est abattu par inadvertance par Pfarrer qui possédait une arme mais « n'avait jamais tiré un coup en 20 ans ». La fin de Chad-Pitt est donc soudaine et ridicule... Il s'agit d'une mort anti-brad-pittéenne.

On peu lire le personnage de George Clooney de la même manière. Pour lui aussi, le costume et le maquillage ne le rend que plus proche de son image habituelle (Urgences, pub télé...). C'est encore une fois l'acteur et son personnage fétiche que nous voyons à l'écran, mais pas une création. Harry Pfarrer marié à un charmante femme la trompe avec qui veut bien de lui. Il a sa maîtresse habituelle, mais en cherche d'autres, sur internet si besoin. Inventeur d'une chaise à bascule révolutionnaire pour sa femme, ce personnage n'existe que par la pénétration du sexe opposé et ce sur toute la durée du film : c'est la seule chose qui justifie sa présence à l'écran ! On le voit courir les femmes, on le voit face à sa maîtresse amoureuse qui quitte son mari pour lui et on le voit se faire plaquer lamentablement par sa femme. Alors qu'il se sent persécuté par il ne sait trop quoi, peut être la CIA ou l'Armée, Harry-Clooney finit par attraper l'homme qui ne cesse de l'espionner pour apprendre qu'il s'agit d'une personne envoyée par l'avocat de sa femme qui souhaite divorcer ! Harry-Clooney finit donc par fuir cette situation au Vénézuela ! On est ici encore loin d'une fin glorieuse comparé au personnage fétiche de George !


Vent de folie généralisé sur pays en crise

Dans ce film, les acteurs hollywoodiens ne sont pas les seuls à être mis à mal : tout le système de surveillance des États-Unis y passe. Où sont donc les bons vieux films d'espionnages ? Que font les agents chargés de la surveillance du pays ? Ne sont ils pas surchargés de travail, prêts à désamorcer des bombes pour sauver le pays ? Les frères Coen livrent ici une toute autre image que celle conventionnellement proposée par les blockbusters (ou séries) américaines.

Les frères Coen montrent avec humour les déviances de l'administration américaine et la paranoïa des américains. Les plus hauts fonctionnaires des instances de la sécurité nationale n'ont rien de mieux à faire que de surveiller une poignée de citoyens américains insignifiants qui se font un film ! À partir d'un CD dont ils ne comprennent pas les données, Chad et Linda se construisent une histoire d'espionnage pleine de dangers et de rebondissements, comme dans un film d'action. Mais la CIA entre dans le jeu ! Ils surveillent tous leurs faits et gestes au cas où... Au cas où quoi d'ailleurs ? Ils transmettraient des informations à l'ennemi ? Mais quel ennemi, Chad et Linda en bons citoyens à côté de la plaque vont frapper à l'ambassade Russe ! Mais la guerre froide est finie ! Ils se trompent de porte! C'est justement toutes les incongruités dues à la situation non maîtrisée de Chad et Linda qui crée le danger. Après que Harry ait tué Chad, il le prend pour un espion parce qu'il porte un costume noir et n'a pas ses papiers ! Les frères Coen montrent tout ce que peut avoir de ridicule la lutte anti-tout ! Les frères Coen décrivent des citoyens en mal d'aventure, à l'image de leurs services de renseignement !


Dans ce film, on retrouve la vanité présente dans les films des frères Coen : « le tout ça pour ça » jubilatoire qu'ils maîtrisent parfaitement, l'art de la chute. Si je devais comparer ce film à un autre, je m'abstiendrais de le mettre face à No country for old men, mais je le comparerait volontiers à un film français sorti à la même date : Secret défense. Si le sujet est le même (pour ce dernier on est en français mais le film est fait à l'américaine avec des thèmes américains transposés en France) : les services de renseignement et leurs tâches quotidiennes, le film des frères Coen est critique et s'affirme avec un propos efficace. À l'inverse, le film de Philippe Haim, que se voulait quasi documentaire avec son armée de consultants, ne réussit à faire qu'un film d'action manichéen. Il y a d'une part les gentils qui se font avoir par tous et les méchants qui sont vraiment très méchants !!! Ici, rien de tout ça, il n'y a qu'une bande de naïfs paranoïaques qui vivent comme des poissons rouges dans un bocal sous la surveillance d'incompétents haut placés !

Ce dernier Coen s'inscrit honorablement dans leur filmographie avec ce regard décalé sur l'Amérique qui enchante ses spectateurs.

Filmographie de Joel et Ethan Coen